Plus rien ne semble aller au FPI à quelque mois de la présidentielle 2020. Le divorce entre Gbagbo et Affi est consommé.

Le gros montage politique, avec ses arrière-pensées, a fini par exploser en plein vol. C’est le jeu du poker menteur. La réalité a rattrapé la mise en scène: le projet de réunification du FPI est mort-né et le divorce entre Laurent Gbagbo et Pascal Affi N’Guessan, consommé sauf cataclysme selon la belle formule de Bédié, pour qui « la politique est l’art de l’impossible ».

Le 28 mai 2020, Affi a salué la décision de la Chambre d’appel de la CPI, accordant à Gbagbo et Charles Blé Goudé leur liberté de paroles et de mouvements. Mais moins de deux semaines plus tard, c’est le clash avec la rhétorique guerrière. Il est sorti soudainement de ses gonds pour tirer à boulets rouges sur l’accord-cadre que Laurent Gbagbo, leader d’une tendance du FPI, et Henri Konan Bédié, président du PDCI-RDA, ont conclu, le 30 avril 2020, dans le cadre de la Coalition pour la démocratie, la réconciliation et la paix (CDRP, alliance politique).

Dans une colère noire, Affi assimile cette initiative à une « pseudo-réconciliation » que des « gens sans foi ni loi » veulent conduire à travers « une politique qui consiste à s’associer à n’importe qui, n’importe comment » (cf. Fraternité Matin du 6 juin 2020). Le président de la tendance légale du FPI retrouve sa hargne de 2019. Après sa rencontre avortée avec Gbagbo, le 22 mars à Bruxelles, il avait descendu en flèche l’ancien président de la République, « l’arrogant », « l’homme dépassé », qu’il a comparé à Robert Mugabe et Abdel Aziz Bouteflika, et le « chef de la fronde au sein du FPI ».

Si, sur les traces de Sylvain Miaka Ouretto, son intérimaire quand il était détenu à la prison de Bouna, Affi a envisagé, le 9 janvier 2019, avec Bédié la formation d’une plateforme politique « non idéologique », il voit d’un mauvais œil sa mise à l’écart. Au profit de Gbagbo dont il feignait, pourtant, de reconnaître le leadership historique.

Les 3 et 4 janvier 2020, en effet, sa rencontre a finalement eu lieu, à Bruxelles, avec Gbagbo. Avant des négociations retenues entre les deux tendances du FPI pour enterrer la hache de guerre, Affi acceptait que la présidence du parti revienne à son fondateur à l’issue du Congrès unitaire. Mais il proposait que « la 1ère vice-présidence du parti, assurant l’intérim avec les pleins pouvoirs » lui revienne.

Last but no least, Affi demandait à être le colistier de Laurent Gbagbo à la présidentielle du 31 octobre 2020 si celui-ci était désigné candidat pour le compte du parti. Mais patatras; les dernières évolutions faussent tous les calculs, déstabilisent tous les agendas cachés et les éventuels pièges. D’abord, Alassane Ouattara a taclé l’Opposition dans sa réforme constitutionnelle: le ticket présidentiel n’existe plus. Ensuite, depuis le 28 mai, Gbagbo n’est plus interdit ni de participer à la vie politique ni de revenir dans son pays. Et enfin, l’ombre du célèbre prisonnier de La Haye est venu ravir l’assurance que Affi avait commencé à prendre auprès du PDCI-RDA.

Affi a donc trouvé la parade. Il a déclaré la guerre au « dissident » Gbagbo et claqué la porte des discussions sur la réunification du FPI. Si le mur de méfiance s’est brisé en janvier, Affi érige le rideau de fer. Car, dans ses ambitions, il n’entend point être le mouton du sacrifice. Et la lutte fratricide qu’il entame contre Gbagbo rappelle, dans la Bible, l’histoire des frères Caïn et Abel (Genèse 4, 1-15).

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