En posant des préalables aux débats politiques, le porte-parole du gouvernement a levé sans se rendre compte un point de voile sur les intentions du pouvoir Ouattara. La vérité qui se cache derrière les conditions posées par Amadou Coulibaly c’est que le gouvernement cherche à se tailler une réconciliation sur mesure tout en faisant du marchandage sur les questions à débattre.

Après plusieurs jours de pause, le dialogue politique entre le gouvernement et l’opposition a repris le lundi 14 février dernier. Cette reprise des discussions entre le pouvoir et l’opposition qui visent à recoller le tissu national a été particulièrement marqué par les propos graves tenus par Amadou Coulibaly. 

Ce dernier, a posé certains préalables à la tenue des discussions que l’on pourrait qualifier de curieux. Le ministre de la communication et des médias du gouvernement Patrick Achi a donné clairement ce qui semble être la position du gouvernement et de son parti, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (Rhdp).

A en croire le porte-parole du gouvernement, le vocable de prisonniers politiques ne sera pas acceptés dans les échanges. Aussi, il a dénoncé catégoriquement le fait que l’on réclame le retour en terre ivoirienne des filles et fils de la Côte d’Ivoire contraint à l’exil.

Cela trouverait selon lui sa justification dans le fait qu’étant dans l’opposition avec le Rassemblement des républicains (RDR), ils auraient connu l’exil sans que quelqu’un ait réclamé leur retour. Si dans le camp présidentiel, ces propos ont été perçu comme des « vérités crues », il faut signaler qu’elle a provoqué une forte indignation dans la population.

Le gouvernement cherche à se tailler une réconciliation sur mesure tout en faisant du marchandage sur les questions à débattre

Amadou Coulibaly tout comme les partisans du parti présidentiel qui applaudissent ces propos se trompent largement. Aucun vrai dialogue, sincère, objectif et sérieux sur la réconciliation nationale ne peut se faire sans ces grandes questions qu’il souhaite mettre à la poubelle. Pour conjurer le cycle infernal de crise et panser les meurtrissures, il est plus qu’essentiel que tous les Ivoiriens qui croupissent dans les prisons du fait des crises qui ont perturbé la cohésion sociale recouvrent la liberté et retrouvent leurs proches.

Quant aux exilés, la question est d’autant plus importante que c’est la constitution de notre pays qui défend qu’Ivoirien soit exilé. En faisant du retour des exilés un problème, le pouvoir Ouattara entre directement en conflit avec la loi fondamentale de la Côte d’Ivoire.

Sur les cas spécifiques de Guillaume Kigbafori Soro et Charles Blé, Alassane Ouattara et son équipe jouent la sincérité de la réconciliation nationale dont le président de la République s’est fait le chantre dès le lendemain de son troisième mandat. Va-t-il se comporter en véritable père de la nation en passant ses états d’âme personnels pour privilégier l’intérêt général en n’excluant pas les deux anciens leaders estudiantins du projet de la réconciliation nationale.

Le gouvernement tout comme le Rhdp doivent comprendre une fois de plus que la réconciliation n’est pas un cadeau ou une faveur faite à l’opposition

Voici là le vrai enjeu du dialogue politique. Le faire ne sera pas un cadeau particulier aux hommes dont l’un est condamné à une double peine de vingt ans et à perpétuité pendant que l’autre, acquitté par la Cour pénale internationale ; attend depuis plusieurs mois que lui soit délivré un passeport pour rentrer dans son pays. Ça sera plutôt donner une chance à la réconciliation et au renforcement de la cohésion sociale. De plus le gouvernement tout comme le Rhdp doivent comprendre une fois de plus que la réconciliation n’est pas un cadeau ou une faveur faite à l’opposition.

Bien au contraire, c’est répondre aux attentes d’une bonne partie du peuple Ivoirien qui ne se sent pas encore véritablement intégrés dans la République. N-at-on pas vu le débat qui a eu court lorsque le parti au pouvoir a été frappé par la disparition des deux premiers ministres Amadou Gon Coulibaly et Hamed Bakayoko ? alors que les partisans du pouvoir pleuraient ces deux personnalités, des Ivoiriens, Dieu seul sait combien ils sont nombreux ne se sentaient pas concernés par ce deuil.

D’ailleurs certains n’ont pas manqué de l’exprimer. C’était la meilleure preuve qu’il y avait rupture du tissu national et qu’il fallait donc faire quelque chose pour recoller les morceaux. Le dialogue politique, tout le monde l’a constaté et dit connait des tâtonnements en plus d’avoir été assis sur une base d’exclusion certes, mais il est encore possible de sauver les meubles pour donner une chance réelle à la paix. Pour cela, il faut sortir des préalables qui en réalité n’ont aucun objectif si ce n’est de faire du marchandage.

Générations Nouvelles

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