Au départ, c’est l’idée d’un « Comité de réflexion » dont le germe a poussé dans la tête de Henri Konan Bédié, président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci). Objectif : redresser la barque Pdci qui chaloupe depuis quelque temps… Il en souffle mot à Maurice Kakolu Guikahué, Secrétaire exécutif en chef du parti, à son retour de France, et à certains barons du parti, dont Gaston Ouassenan Koné, Émile Constant Bombet. Très vite, les anti-Guikahué s’engouffrent dans la brèche…

Ils y voient-là une ultime aubaine pour le mettre sous éteignoir. Et, à l’arrivée, c’est « un Comité politique fabriqué de toute pièce », resserré autour du noyau dur contre Maurice Kakou Guikahué, qu’on aurait fait signer au président du parti.  « Le Comité politique est chargé de l’analyse, de l’élaboration de la stratégie politique et du suivi des activités politiques du parti du président du parti et en liaison avec le cabinet du président, en vue du renforcement du positionnement politique du parti », suivant l’article 1er qui fonde cet organe.

Ce Comité est doté d’un Secrétariat général confié à Me Blessy Chrysostome. L’ex-magistrate originaire de Daoukro, Attoubé Koko, est nommée Secrétaire générale adjointe.

Maurice Kakou Guikahué est relégué au rang de Conseiller spécial auprès du président du parti, chargé du suivi du Comité politique. Résultat : tollé, colère et démissions, avons-nous appris, mardi 27 avril 2021, au siège du Pdci, à Cocody, où régnait, à notre passage, une ambiance, pour le moins morose. Le constat sur place est saisissant. Des clans antagonistes sont observables. Ce n’est pas encore le désordre total, mais le parti est en pleine brouillerie, pour ne pas dire confusion.

La question qui revient est de savoir ce qui va rester du Pdci après ce virage qu’il est en train de négocier. La mise en place de ce Comité politique a ouvert une guéguerre au sein du Pdci.

Des membres du Secrétariat exécutif ne veulent pas accepter l’idée que le Comité politique sonne le glas à cette instance du parti. Pas même qu’ils soient dépouillés de leurs responsabilités. « Le Secrétariat exécutif ne disparaît pas. Nous sommes en place jusqu’à ce que le président Bédié prenne officiellement la décision de nous faire disparaître », nous a confié, hier mardi 27 avril 2021, un membre du Secrétariat général.

En fait, plusieurs camps s’affrontent en ce moment au Pdci. « Les partisans de Bédié, les fanatiques de Tidiane Thiam, les troupes de Jean-Louis Billon, ‘’l’armée’’  de Guikahué et les pro-Rhdp. Ils s’adressent à peine la parole », a-t-on appris. 

Lassina Sanogo alias Lass Mao, président de la Coordination des transporteurs du Pdci, a eu, mardi, à notre passage, une violente  altercation avec un proche d’un camp opposé, dans la cour arrière du siège du Pdci.

Mis en place en vue de dynamiser le fonctionnement du Pdci, le Comité politique est en passe de se révéler comme l’étincelle qui pourrait embraser le parti dé Bédié.

3 personnes sur le départ…

Les dégâts pourraient être considérables, tant les visions sont irréconciliables entre ces clans. Car, à peine installé que le Comité politique connaît déjà des remous, une profonde fissure et des contestations en son sein. « 3 personnes sont sur le départ », nous a révélé un membre de ce Comité politique, avec beaucoup d’amertume. 

«C’est un organe mort-né. A part 4 ou 5 personnes nommées dans ce Comité politique, les autres sont des conspirations contre le Secrétaire exécutif en chef. Le comité des sages se plaint tout comme les autres instances du parti.  Aujourd’hui, c’est un brouillamini total au Pdci. Le contexte de crise dans lequel ce Comité politique a vu le jour le condamne à mourir dans les prochains mois.

Déjà trois personnes, dont une femme, nommées dans ce Comité politique ont poliment décliné l’offre de Bédié. Le lundi 26 avril 2021, après la publication de la liste, la femme en question s’est rendue à la résidence de Bédié pour lui dire qu’elle ne peut pas assumer les charges qui lui ont été confiées.

Comme prétexte de refus, elle a dit au président Bédié qu’elle va s’installer au Canada », nous a informé, hier mardi, un membre du Comité politique, visiblement affecté par la tournure que prennent les choses. Celui-ci a fait part de ses appréhensions quant à l’espérance de vie de ce Comité politique. Il pointe, par exemple, les télescopages des fonctions entre les membres du Comité politique, ceux du Secrétariat exécutif et des autres organes du parti.

En parcourant ces nominations, on se retrouve dans un véritable labyrinthe, avec des embranchements de charges dans lesquels on s’égare…

L’ancien ministre Jean-Louis Billon, Secrétaire exécutif du Pdci-Rda, chargé de la Communication, l’information et la propagande du parti, se retrouve au Comité politique avec une nouvelle casquette.  Il a été nommé Coordonnateur général délégué chargé des régions du Nord. 

Adiko Roland, Secrétaire exécutif en charge des élections, est bombardé dans le Comité politique, Coordonnateur chargé des élections.

Ehouman Bernard, Directeur de cabinet par intérim du président du parti, Secrétaire exécutif chargé des délégations générales, se voit attribuer les charges de Coordinateur général du Comité, chargé de la mobilisation et du développement. Bredoumy Kouassi Soumaila, Secrétaire exécutif chargé du monde rural, porte aussi le chapeau de Coordonnateur général délégué du monde paysan et de la solidarité communautaire.

Colère et ébranlement …

Doulaye Coulibaly, Secrétaire exécutif chargé des relations avec les élus locaux et les Conseillers économiques et sociaux, environnementaux et culturels du parti, est nommé membre sans portefeuille au sein du Comité politique. 

Robert Niamkey Koffi, Secrétaire exécutif chargé de la formation et de l’Institut politique du parti, est aujourd’hui nommé Coordonnateur général du comité, chargé de la gestion et du suivi des élections.

Thierry Tanoh, la coqueluche de certains militants, déjà Secrétaire exécutif chargé des finances du parti, se retrouve avec la casquette de Coordonnateur général délégué chargé des cadres et du secteur de l’Économie. 

L’ancien ministre de l’Économie et des finances dans le régime Bédié, Emmanuel N’Goran Niamien, vice-président du parti, est nommé Conseiller du Coordonnateur général.

Le comble, aux yeux de cadres et militants du Pdci, dans ces choix de Bédié où l’on a du mal à trouver une issue de compréhension, ce sont les nominations des vice-présidents du parti, « des monuments » comme Émile Constant Bombet et Gaston Ouassénan Koné dans les fonctions de Conseillers du Coordonnateur général du Comité politique, en l’occurrence Allah Kouadio Rémi.

Pour de nombreux militants, ces nominations fâchent parce qu’elles « dégradent moralement » ces deux hautes figures du parti. 

Au comité des sages du parti dont Me Cheikna Sylla est le Coordonnateur des activités et qui comprend, entre autres, Camille Alliali, « colère et ébranlement » s’entremêlent.

De leur côté, les cadres du Pdci issus du défunt Mouvement des élèves et étudiants de Côte d’Ivoire (Meeci) sont vent debout contre « la mise en place, dans un climat de crise au sein du parti, contre ces instances qui ne feront qu’amplifier les troubles et exacerber les malentendus ». Quoique statutaires, reconnaissent-ils, le moment choisi « par le président est inapproprié », car « il donne le sentiment de déshabiller Pierre pour habiller Paul, sur un tempo de règlements de comptes ». 

Au cours d’une réunion qu’ils ont tenue, lundi 26 avril 2021, au siège du parti, ils ont arrêté le principe d’une « forte déclaration » qui sera rendue publique, cette semaine.  Il s’agira, avons-nous appris, de « condamner » l’attitude des jeunes, avant d’interpeller le président du parti sur «le risque d’implosion » que les récents choix opérés font courir sur le parti.   

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