Le président Henri Konan Bédié revient de loin, la Côte d’Ivoire revient de loin. C’est le moins que l’on puisse écrire, une semaine après la levée du blocus de la résidence du président du PDCI-RDA, pour qui a suivi de bout en bout les événements des 2 et 3 novembre 2020 et ainsi de suite.

Que serait devenue alors la Côte d’Ivoire si durant ces jours de « folie », l’irréparable s’était produit ? Pourtant, ce n’est pas la possibilité qui manquait. Surtout que les ingrédients d’un cocktail explosif étaient réunis. Voici, à peu de choses près, ce qui s’était passé à la résidence du président du PDCI-RDA, président de la CDRP, président de la coordination des plateformes et partis de l’opposition.

On se rappelle que le 31 octobre, en dépit de toutes les interpellations, le régime en place a organisé le scrutin qui a vu des manifestations partout dans le pays, mais aussi et surtout une grande et grave répression des manifestants faisant des morts, des blessés et des dégâts matériels.

Dans la soirée du 31 octobre, le débat faisait déjà rage quant au taux de participation que des observateurs internationaux estimaient à moins de 10%, dans une élection non inclusive et surtout émaillée de violence. Le lundi 2 novembre, l’opposition qui parle de « parodie d’élection n’étant pas à même d’élire un nouveau président de la République en remplacement de M. Ouattara en fin de mandat et constitutionnellement inéligible pour un troisième mandat, constate la vacance de la présidence de la république de Côte d’Ivoire ».  

Elle fait savoir dans un communiqué publié le même jour: « la candidature illégale et anticonstitutionnelle du Président sortant, Alassane Ouattara ; le caractère partisan de l’organe en charge des élections ; la liste électorale truffée d’irrégularités ; les décisions iniques du Conseil constitutionnel du 14 septembre 2020, invalidant certaines candidatures….

Tirant les conséquences de la vacance du pouvoir exécutif, avec la fin du mandat présidentiel de Monsieur Alassane Ouattara et la non tenue d’une élection crédible ; Considérant que le maintien de Monsieur Alassane Ouattara en qualité de chef de l’Etat est susceptible susceptible d’entraîner la guerre civile, Les partis et groupements politiques de l’opposition annoncent la création, ce jour, du Conseil National de Transition. Le Conseil National de Transition est présidé par Monsieur Henri Konan Bédié, Président du PDCI-RDA et de la plateforme CDRP.

Le Conseil National de Transition a pour missions de : préparer le cadre de l’organisation de l’élection présidentielle juste, transparente et inclusive ; mettre en place, dans les prochaines heures, un gouvernement de transition ; convoquer les assises nationales pour la réconciliation nationale en vue du retour à une paix définitive en Côte d’ivoire. »  

COURAGE CONTRE BALLES ET BLOCUS  

Le mardi 3 novembre, le gouvernement publie un communiqué dans lequel il dit : « Le lundi 2 novembre 2020, Monsieur Pascal Affi N’guessan, s’exprimant au nom d’une plateforme de l’opposition, a annoncé la mise en place d’un organe de transition dénommé Conseil National de Transition, devant se substituer aux institutions républicaines légalement établies.

Cette déclaration ainsi que les violences perpétrées suite au boycott actif constituent des actes d’attentat et de complot contre l’autorité de l’Etat et l’intégrité du territoire national. Ces faits sont prévus et punis par la loi pénale.

Condamnant avec la plus grande fermeté cet acte de sédition, le Gouvernement a saisi le Procureur de la République près le tribunal de première instance d’Abidjan afin que soient traduits devant les tribunaux, les auteurs et les complices de ces infractions. ». De fait, dans l’entendement du gouvernement, l’opposition, sous la houlette du président Bédié, s’apprêtait à publier son gouvernement de transition. Ce qu’il a du reste appelé « sédition » pour laquelle les responsables qui ont annoncé la création du CNT devaient être mis aux arrêts et être jugés.

Les 02 et 03 novembre, des proches, des collaborateurs et de bonnes volontés avaient conseillé au président Bédié de quitter sa résidence, en prévision de ce qui se tramait contre lui. Mais, en bon chef déterminé, il a dit qu’il ne bougerait pas et il n’a pas bougé. Le 3 novembre, dès 8h, il était à son bureau en train de travailler quand un comité restreint du secrétariat exécutif était en réunion pour préparer un texte dans lequel il devait, le soir venu, remercier ses pairs des partis politiques de l’opposition qui lui font confiance en le désignant président du CNT.  

LE BOUCLIER DU PEUPLE  

Dans l’après-midi de ce 3 novembre, d’importants détachements de la police puissamment armés arrivent à la résidence du président Bédié qu’ils prennent d’assaut avec des armes de guerre, aux fins de mettre aux arrêts tous les occupants, donc évidemment le président Bédié.

On apprendra aux mêmes instants que les résidences des autres leaders de l’opposition tels Pascal Affi Nguessan, Albert Toikeusse Mabri, Assoa Adou, Hubert Oulaye, sont également prises d’assaut pour les mêmes raisons. Devant chez Bédié, les jeunes du PDCI-RDA qui avaient voulu s’opposer ont été très rapidement débordés par des renforts de la police et de certains éléments en tenues. Des rafales d’armes automatiques sont tirées.

Et quand ils ont défoncé le portail et ont eu accès à l’intérieur de la résidence, ils ont rejoint le président Bédié tout en notifiant qu’ils ont ordre de mettre aux arrêts tous ceux qui se trouvent dans l’enceinte de cette résidence, à l’exception du président et de Mme Bédié. Ils prennent une vingtaine de personnes, dont le secrétaire Exécutif en chef, Maurice Kakou Guikahué, d’autres secrétaires exécutifs, des avocats, le personnel de maison, des parents du président, tous conduits à la préfecture de police d’Abidjan.

Le président et son épouse sont alors restés seuls, sans gardes ni domestiques, dans la résidence encerclée d’hommes en armes et en mission pendant 8 jours, avec tous les risques que cela suppose, quant à d’éventuels ordres qui pourraient arriver la nuit, ou à d’éventuelles montées de nervosité d’hommes en armes. Tout pourrait arriver au président et à son épouse.  

Le 4 dans la matinée, novembre, quand les ambassadeurs de la France, de l’UE, des USA et de Grande Bretagne, arrivaient chez lui, le président Bédié a dit qu’il ne les recevrait pas tant que ses conseils ne sont pas là. Ce n’est qu’en début de soirée, avec certains de ses collaborateurs libérés et en leur compagnie, il a reçu lesdits ambassadeurs.

Le président Bédié restera ainsi dans cette prison, privé de tout pendant huit jours, jusqu’à ce qu’il soit sollicité par le président Ouattara pour un dialogue à l’hôtel du Golf, lieu du reste choisi par le président Bédié, non seulement par symbolisme de ce que Ouattara ne devrait jamais oublier, mais aussi pour passer un message que lui Bédié quitte un blocus pour aller négocier dans un lieu où les deux ont connu le blocus. M. Ouattara a-t-il perçu ce message ? Le blocus sera levé le 11 novembre, quelques heures avant le dialogue à l’hôtel du Golf.

Pendant tout ce temps, il a gardé la main sur la marche de son parti, le PDCI-RDA et de l’opposition. Le blocus levé, il a repris ses activités de leader charismatique de l’opposition et du peuple épris de paix, de justice, de démocratie et de cohésion nationale. Il est et demeure la pierre angulaire du renouveau ivoirien, qui tient la télécommande du retour à la normale, le retour à la paix. Sinon, quelle interprétation serait faite, s’il avait quitté sa résidence dès le 2 novembre ? En vrai capitaine du navire ivoire, il n’a pas voulu quitter la barre. Et c’est ce qui sauvera le pays.

Pour la Côte d’Ivoire, Bédié n’a pas eu peur des armes, ni de l’arrestation, il était même prêt à mourir pour le peuple. Dans la nuit du 3 novembre, beaucoup de choses pouvait se passer, il pouvait y avoir des mouvements, des soulèvements et autres manifestations qui pouvaient dégénérer et Bédié serait déjà aux mains des hommes en armes, mais il n’en a pas eu peur, parce qu’il se disait que pour la Côte d’Ivoire, il n’avait pas le droit de fuir la lutte. Il n’a pas déçu, et le peuple le lui reconnait.  

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