Il y a de cela quelques mois, personne ne pouvait parier un centime sur l’éventualité que le chef de l’Etat Alassane Ouattara, président du RHDP, fasse à nouveau les yeux doux à Henri Konan Bédié, président du PDCI-RDA et à son parti.
En effet, on se rappelle que devant des populations de Bouafflé, le chef de l’Etat au fait de sa puissance ( ?) tournait en dérision tous les autres qui lui parlaient de réconciliation, en disant : « Le premier pilier concerne la consolidation de la paix, de la sécurité et de et de la cohésion sociale. Certains appellent ça la réconciliation. Réconciliation, mais moi je ne suis pas en palabre avec quelqu’un ! Est-ce que vous avez des palabres avec quelqu’un ? Nous sommes tous réconciliés »
Il est bien loin le temps où le patron du RHDP, à qui des rapports de mise à mort du PDCI-RDA ont été faits, croyait avoir fini avec le vieux parti et son président ; il est loin le temps où l’on claironnait dans toutes les réunions du RHDP que ceux qui étaient partis avec M. Ouattara étaient la crème, la sève et les racines du PDCI-RDA et que de ce parti, il ne restait plus rien ; il est loin le temps où l’on parlait de PDCI-Daoukro pour désigner le parti créé par Houphouët-Boigny qui refusait de se laisser phagocyter par le nouveau-né RHDP.
De 2018 à maintenant, beaucoup d’eau aura coulé sous le pont. Mettant en relief la grosse réalité qui est que la nasse du RHDP de M. Ouattara a certes pris de gros poissons dans la mer du PDCI-RDA, mais l’abondance de petits poissons vifs a tué la valeur de ces cétacés désormais otages de leurs propres propensions à vouloir détruire la case du père pour espérer construire une autre avec son nom.
La grosse réalité a tué l’orgueil
Trois ans après la rupture que Bédié est allé annoncer à Ouattara le 8 août 2018, deux ans après la naissance officielle du RHDP, le 26 janvier 2019 ; huit mois après l’annonce de sa candidature pour un troisième mandat des plus contestés ; après plus de trente-six mois de tentatives de destruction du PDCI-RDA à travers des procès, des débauchages, des intimidation, des pressions, six mois après la présidentielle dans des conditions de violence inouïe, le patron du RHDP Alassane Ouattara aura sans doute fait un constat.
Il est esseulé, il est acculé par la situation socioéconomique et politique qui fait déchanter. D’où le courage qu’il prend de tendre la main à nouveau à Henri Konan Bédié et au PDCI-RDA, dont il voudrait bien se servir comme d’une bouée de sauvetage en pleine tempête. Le président Alassane Ouattara qui n’a d’autre choix aujourd’hui que de rechercher la paix et la réconciliation nationale sait très bien a mieux que quiconque que la réconciliation et la paix ne peuvent s’obtenir qu’en ayant comme appui politique le PDCI-RDA, parti de Paix.
Rejeter le PDCI-RDA comme ils l’ont fait depuis 2018 ne leur ont valu que l’isolement politique, puisque le parti dirigé par Henri Konan Bédié a réussi à fédérer les partis de l’opposition autour de lui pour lancer la lutte commune de la démocratie, de la réconciliation et de la liberté. Avec le retour annoncé de Laurent Gbagbo avec qui Bédié a des rapports des plus cordiaux, sur la base d’une alliance pour la paix et la réconciliation, le RHDP risque de se voir battre partout et sur tous les plans. Que faire donc ? Ravaler son orgueil et sa suffisance pour faire à nouveau les yeux doux au PDCI-RDA. Tel pourrait être le calcul du patron du RHDP. Un calcul très tardif en somme.
Homme esseulé cherche secours
Par ailleurs, sur le plan humain, le chef de l’Etat est également de plus en plus isolé. En 2019, au lancement du RHDP, il avait autour de lui cinq (5) piliers fort sur qui reposait le système. Le vice-président Daniel Kablan Duncan, technocrate très discret, ponte du PDCI-RDA qui avait réussi à trainer avec lui presque tous les hauts cadres du parti (ministres, président d’Institution, Directeurs généraux, élus nationaux et locaux) au RHDP ; le Premier Ministre Amadou Gon Coulibaly, fidèle parmi les fidèles qui pour avoir fait toutes ses armes à l’ombre du mentor était presque sa doublure et donc son dauphin ; le ministre Marcel Amon Tanoh, fin connaisseur qui est à cheval sur le principe des deux partis était l’un des confidents du patron du RHDP ; le Ministre puis Premier Ministre Hamed Bakayoko, jeune et bouillant mobilisateur, il était la carte générationnelle le mieux partie ; le Secrétaire général de la Présidence puis Premier ministre Patrick Achi, technocrate chevronné et homme de missions délicates à l’extérieur était un pion essentiel du Palais.
Avec ces cinq hommes, le président se sentait vraiment fort et intraitable. Puis, le sort en a décidé autrement. Deux sont décédés (les Premiers Ministres Amadou Gon Coulibaly et Hamed Bakayoko), deux ont démissionné (le vice-président Kablan Duncan et le ministre des Affaires Etrangères Amon Tanoh). Il ne reste avec le patron du RHDP que Patrick Achi qu’il nommera Premier Ministre. Mais la difficulté de nommer un vice-président demeure, tant le vide est grand autour de lui.
C’est dans ce contexte où la compétition politique s’annonce plus âpre que Laurent Gbagbo acquitté et Henri Konan Bédié ne cachent pas leur idylle. Mieux, ils s’allient. Si l’alliance PDCI-FPI se formalise, Ouattara aura qui autour de lui avec qui il va les contrer politiquement ? Les gens du RDR ne pouvant plus rien lui apporter de nouveaux et les recrues sorties du PDCI à coups de postes et d’argent ayant montré leurs limites, Ouattara serait alors cerné et acculé. Surtout que les chancelleries ont de plus en plus les yeux tournés vers le PDCI-RDA d’Henri Konan Bédié et le FPI de Laurent Gbagbo.
Bédié acceptera tout sauf la dissolution du PDCI-RDA
C’est donc un Ouattara acculé qui prend sur lui de désavouer tous ceux qui, dans son parti, affichent la suffisance, pour chercher à repartir vers Bédié et le PDCI-RDA. Et comme il a déjà dribblé et même humilié Bédié, il choisit de passer par le pur produit du PDCI-RDA qu’est Patrick Achi pour espérer reprendre langue avec l’aîné à qui un blocus avait été imposé en novembre 2020. Mais la mission semble impossible.
Pour la simple et bonne raison que le PDCI-RDA a déjà vécu toutes les situations de frustration (procès contre sa Direction et son Bureau Politique, menaces sur ses cadres, blocus autour de la résidence de son président, emprisonnement de ses militants, humiliation, voire morts de ses sympathisants) pour se laisser à nouveau attendrir par un simple discours. Sous la houlette de son président, le parti a résisté aux pires frustrations et atrocités, parce qu’il ne veut pas disparaitre. Le Président Bédié ne cesse de répéter :
« je peux tout accepter, sauf la dissolution du PDCI-RDA ». Qu’est-ce que demande le chef de l’Etat Alassane Ouattara ? Une fusion-phagocytose dans son RHDP. Donc une dissolution du PDCI-RDA. La base du parti sait que ce n’est pas au moment où le parti a réussi sa mue, a réussi à faire peau neuve avec des militants déterminés, où sa résistance commence à porter des fruits que le président Bédié va le brader à ceux qui ont toujours voulu sa destruction.
Nouveau Réveil