Au terme de sa rencontre du 27 juillet 2021, avec son successeur au Palais présidentiel d’Abidjan-Plateau, Laurent Gbagbo a adressé une liste de prisonniers qu’il souhaite voir le régime Ouattara libérer. Mais, il n’y a pas que fidèles de l’ex-chef de l’Etat qui figurent sur cette liste.
Joignant l’acte à la parole, l’on apprend, de source proche de sa famille politique, le Front populaire ivoirien (FPI), que Laurent Gbagbo a adressé une liste de prisonniers à libérer, au régime d’Alassane Ouattara. Il s’agit d’une liste de 110 personnes, arrêtées à diverses périodes, de la crise postélectorale de 2010- 2011 à ce jour. On y retrouve des têtes fortes du régime Gbagbo comme Bruno Dogbo Blé ; Anselme Séka Yapo dit Séka Séka, Vagba Faussignaux…
On y retrouve aussi des anonymes. Mais, ce qui est frappant, c’est que sur la liste de prisonniers que l’ancien président de la République voudrait voir son successeur élargir, figure des personnalités qui n’ont rien à voir directement avec lui.
Il s’agit notamment de Karamaté Koné Souleymane dit Soul To Soul, directeur de protocole et vieux compagnon d’aventure de l’ancien président de l’Assemblée nationale, Guillaume Soro et de Pierre Narcisse N’dri, directeur de cabinet du leader du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci), Henri Konan Bédié.
Soul To Soul, en prison depuis le 23 décembre 2019, dans la mouvance du retour avorté de Guillaume Soro au pays ce jour-là, est notamment accusé de tentative d’atteinte à la sûreté de l’Etat.
Jugé de durant un mois en même temps que plusieurs proches du président de Générations et peuples solidaires (GPS), il a été condamné à 20 ans d’emprisonnement. Il est le seul civil parmi la vingtaine de proches de l’ex-Premier ministre ivoirien à avoir été ainsi lourdement condamné.
C’est la deuxième fois en l’espace de quatre ans que ce fidèle parmi les fidèles de Guillaume Soro voit ainsi sa liberté de mouvement entravée par le régime d’Alassane Ouattara.
LE GESTE DE GBAGBO
Quant au cadre du Pdci, très proche d’Henri Konan Bédié, il a été arrêté en octobre 2020, à la résidence du président de l’ex-parti unique. En cette période, Pierre Narcisse N’dri et bien d’autres proches de l’ex-chef de l’Etat avaient été arrêtés à la résidence de leur leader, alors que la politique ivoirienne était cristallisée par le 3e mandat du président Alassane Ouattara.
L’opposition, jugeant ce mandat illégal et anticonstitutionnel, avait initié plusieurs actions, notamment une désobéissance civile, pour amener le chef de l’Etat à renoncer à briguer ce 3e mandat.
En représailles, le régime avait alors assiégé la résidence de M. Konan Bédié, avant d’arrêter plusieurs de ses proches. Mais après une rencontre-surprise entre Henri Konan Bédié et son ‘’jeune frère’’ le 11 novembre 2020, quelques cadres du Pdci arrêtés en cette période, vont retrouver la liberté. C’est notamment le cas du secrétaire exécutif du parti d’Henri Konan Bédié. Malheureusement pour lui, Pierre Narcisse N’dri ne bénéficiera pas de cette mesure.
Cela fait donc près de neuf mois que celui dont la mère est décédée il y a quelques jours, est en détention. A l’annonce de cette liste de prisonniers à libérer, les partisans de Guillaume Soro n’ont pas manqué de saluer le grand geste de Laurent Gbagbo. Et pour cause !
« Soul To Soul a fait partie de l’aventure des Forces nouvelles, c’est-à-dire des jeunes gens qui ont pris les armes contre Laurent Gbagbo, pour défendre la cause d’Alassane Ouattara. C’est notamment grâce à leur combat que la candidature de M. Ouattara à la présidentielle de 2010 été autorisée.
Mais une fois au pouvoir, Alassane Ouattara n’a pas eu de sentiment pour ceux qui ont contribué à faire de lui le président de la République. C’est la deuxième fois qu’il fait mettre Soul To Soul en prison. C’est vraiment dommage.
Aujourd’hui, voir le président Gbagbo solliciter clairement la libération de ce proche de Guillaume Soro, c’est touchant. Hier, il a accepté que ces jeunes gens qui ont pris les armes contre lui, soient à ses côtés pour conduire le pays vers la sortie de crise. C’est en ces instants-là que nous comprenons mieux quand il nous disait : ‘’vous me combattez pour quelqu’un que vous ne connaissez pas’’.
Aujourd’hui encore, il leur tend une autre perche. Il faut avoir de la hauteur d’esprit pour agir ainsi », salue un cadre du mouvement politique que dirige Guillaume Soro.
DONNER DU CONTENU A LA RECONCILIATION
« C’est un geste d’humanisme de la part du président Gbagbo qui nous démontre, là, qu’il est vraiment pour la réconciliation nationale. Sa démarche n’a rien à voir avec celle d’Alassane Ouattara qui, pour un rien, n’hésite pas à brimer les enfants du Nord qui ont lutté de toutes leurs forces pour qu’il devienne président de la République. Bon nombre de ces fils du Nord sont en exil, en prison. D’autres sont tout simplement morts.
Quand on est un disciple de Félix Houphouët-Boigny, on n’agit pas de la sorte », renchérit un autre sympathisant de GPS, suggérant au président Gbagbo de ne pas « oublier les pauvres militaires qui ne faisaient que leur boulot en tant que membres de la sécurité de l’ancien président de l’Assemblée nationale.
Le sort qui leur est fait est totalement injuste. Ils se retrouvent en prison, simplement parce qu’ils étaient membres de la garde d’une personnalité. Je demande au président Gbagbo d’étendre son humanisme à ces pères de familles qui croupissent en prison depuis plus d’un an ».
Générations Nouvelles